Le 31 août 2025 marque le centenaire de la naissance de Maurice Pialat (1925-2003), cinéaste majeur du XXᵉ siècle, dont l’œuvre, à la fois âpre et bouleversante, n’a cessé d’inspirer et de questionner. Inclassable, souvent qualifié d’« anti-Nouvelle Vague », Pialat a tracé un chemin singulier dans le cinéma français, en refusant les modes et en privilégiant une approche directe, brute, où l’émotion surgit sans fard.
Des racines auvergnates
Né à Cunlhat, dans le Puy-de-Dôme, Pialat a grandi en Auvergne avant de rejoindre Paris. S’il a construit sa carrière ailleurs, ses origines auvergnates l’ont profondément marqué et nourrissent en filigrane une œuvre qui parle de la terre, des rapports familiaux et de la difficulté à trouver sa place. Cet enracinement discret mais réel, on le retrouve dans son regard, toujours attentif au quotidien, aux gestes simples, aux vies modestes.
L’Amour existe (1960)
Un cinéaste du court avant tout
On connaît surtout Maurice Pialat pour ses longs métrages emblématiques : L’Enfance nue (1968), Nous ne vieillirons pas ensemble (1972), À nos amours (1983), ou encore Sous le soleil de Satan, mémorable et controversée Palme d’or à Cannes en 1987. Mais son parcours débute par le format court, terrain d’expérimentation privilégié. Dès la fin des années 1950, il signe des œuvres marquantes comme L’Amour existe (1960), documentaire poétique et désenchanté sur la banlieue parisienne, récompensé par un prix à Venise, ou encore Janine (1961), qui porte déjà en germe son approche frontale des relations humaines.
Ces films courts et moyens, longtemps éclipsés par ses longs métrages, dessinent pourtant une part essentielle de sa filmographie : ils témoignent d’un regard affûté, à la fois lucide et compatissant, et d’une recherche constante de vérité.
Blow Up : Maurice Pialat en 4 minutes
Blow Up : Le cuir chez Maurice Pialat par Benoît Forgeard
Un cinéma de la sincérité
Ce qui caractérise l’œuvre de Pialat, c’est avant tout sa quête de sincérité. Sans artifices, sans effets superflus, son cinéma va droit au cœur des choses. Familles déchirées, enfances cabossées, amours tourmentées : ses films explorent les zones de tension de l’existence, toujours avec une justesse troublante. « Je ne fais pas du cinéma pour plaire », disait-il, revendiquant un geste artistique exigeant, parfois abrupt, mais toujours profondément humain.
Un héritage vivant
À Clermont-Ferrand, où le court métrage est célébré comme un laboratoire de formes et de récits, nous tenons à saluer cette part de l’œuvre de Pialat. Elle rappelle que les grands cinéastes se révèlent souvent dans la brièveté, dans cette intensité propre au format court. Un siècle après sa naissance, Maurice Pialat continue d’inspirer par son regard sans concession et par cette manière unique et brute de faire jaillir la vérité des êtres à l’écran.
Son cinéma, à la fois rugueux et lumineux, reste une leçon de sincérité et une invitation à regarder autrement le monde qui nous entoure.
Célébrations et hommages
À l’occasion de ce centenaire, de nombreuses initiatives rappellent l’importance de son héritage.

Du 3 septembre au 1er octobre 2025, la Cinémathèque française rend hommage au cinéaste à travers une rétrospective de l’intégralité de ses œuvres, des rencontres, des témoignages et des temps forts.

Le critique de cinéma auvergnat Jérôme Momcilovic donnera notamment une conférence « Maurice Pialat, le sixième sens » jeudi 11 septembre 2025 à 19h salle Georges-Franju.

La plateforme dédiée au format court rend hommage à Maurice Pialat à travers deux courts métrages réalisés par ses soins (L’Enfance nue et Janine) et un troisième où il a fait l’acteur (Les Veuves de quinze ans de Jean Rouch), comme il s’en délectait de temps à autre. Vous retrouverez aussi un dossier sur l’œuvre courte du grand cinéaste dans le dernier numéro en date de la revue.

© KEYSTONE-FRANCE/Gamma-Rapho, Getty

Dans le cadre du podcast Les Nuits de France Culture et pour célébrer le centenaire de la naissance de Maurice Pialat, Albane Penaranda vous propose une sélection d’archives radiophoniques avec le cinéaste dans lesquelles il se raconte à travers ses films, de 1969 à 2002.

Explorez toutes les archives de la télévision française autour du cinéastes : les portraits, les interviews, les reportages autour de ses œuvres et de son parcours.

À voir en ligne :
Congrès eucharistique diocésain (Maurice Pialat, 1953)

Tourné à Auzelles, dans le Massif Central, région natale du cinéaste, le documentaire évoque une journée de fête religieuse dans une bourgade rurale : procession avec ostensoir dans les rues fleuries, messe en plein air dans un parc… Rites catholiques dans la France rurale des années 50, observés avec une affectueuse minutie ethnographique. Dans ce tableau campagnard religieux, entouré par la nature, même les animaux semblent faire partie de la fête. Pialat cinéaste semble découvrir les vertus puissantes d’un autre cérémonial, celui du travelling.

À voir en ligne :
Maurice Pialat, le cinéma, la mise en scène et les acteurs (2025)

Cent ans après sa naissance, Maurice Pialat reste une voix unique du cinéma. Un maître de la mise en scène naturelle, où acteurs et émotions se fondent en une vérité crue. Un documentaire à visionner sur la plateforme France.TV.